Un documentaire indien, « Final solution » de Rakesh Sharma est interdit en Inde par la commission de censure centrale. Primé aux festivals de Berlin et de Hongkong, ce documentaire retrace les événements des massacres du Gujarât en 2002[1].
Le gujarât est un état situé à l'ouest de l'Inde (carte) qui à connu une journée d'émeute de la part de terroristes musulmans. 56 passagers du train Sabarmati express furent brûlés vif à Godhra le 27 février 2002. La responsabilité de ce massacre n'est pas clairement établi (service secret pakistanais, complot, extrémistes musulmans, manœuvre de VHP) Quelque qu'en soit les responsables, seulement quelques heures après, un pogrom fut mis en place contre la communauté musulmane avec la complicité, voir la participation[2] des autorités. Pendant plusieurs semaines, des intégristes hindous vont tuer, violer, détruire. Au final, plus de 1500 morts, au moins 100 000 musulmans chassés de leurs foyers, 240 dargans (sanctuaires musulmans) détruits ainsi que 180 mosquées. Les fondements de la survie économique de la communauté musulmane, dont le sort est peu enviable, furent détruites. Le tout grâce au terreau idéologique mis en place préalablement par le parti nationaliste en place au gujurat: le BJP.

Le documentaire « Final solution » donne la parole aux extrémistes hindous et mêle témoignages d'émeutiers et de victimes. La commission de censure a jugé que ce documentaire pouvait «déclencher des troubles et des violences communautaires».
Mais cette justification montre à quel point le problème est pris à l'envers. Les violences ont eut déjà lieu et personne ne les a interdit à l'époque, les instigateurs et participants n'ont toujours pas été condamné et certains sont même des élus en place.... Ce documentaire, pourrait permettre un travail historique pour comprendre et connaître les responsabilités de chaqu'un. C'est une étape nécessaire pour tenter de permettre aux deux communautés de pouvoir vivre ensemble. Interdire ce documentaire protège les responsables, cautionne les mensonges et au final entretient et attise les tensions communautaires. La censure est un outil fasciste.

En avril 2002, dans son essai sur les événements au Gujarat, "Démocratie", Arundhati Roy écrivait qu'il n'y a pas pire terrorisme que celui de l'Etat, mais elle précisait que le fascisme est aussi L’infiltration lente et régulière, de tout les instruments du pouvoir de l’Etat. C’est la lente érosion des libertés civiques, les petites injustice de la vie de tout les jours. Le combattre, c’est combattre afin de regagner le cœur et l’esprit des gens. Le combattre (…), c’est surveiller d’un œil d’aigle les institutions publiques et réclamer des comptes. C'est être à l’écoute des murmures des plus démunis. C’est donner la parole aux milliers de voix qui montent des mouvements de résistance à travers tout le pays pour exprimer leurs préoccupations(…) C’est combattre contre le déplacement des gens, la perte de leurs terres et le scandale quotidien du dénuement total. C’est aussi ne pas tolérer que les colonnes de nos journaux et les spots publicitaires aux heures de grande écoute soient infectés par leurs passions hypocrites et leur goût de la mise en scène théâtrale, lesquels n’ont pour but que de détourner notre attention de l’essentiel.

Notes

[1] Source: Le Monde daté du 8 août 2004

[2] Rapport d'HRW, Rapport de la FIDH