Récapitulation des faits:

   * L'Inde n'est pas signataire du traité de non-prolifération et a développé avec succès un programme nucléaire militaire faisant du sous-continent indien une nouvelle puissance nucléaire. Ce programme faisait réponse à celui du Pakistan avec lequel l'Inde entretient des relations très conflictuelles depuis la partition.
   * Jusqu'ici, l'importation de technologie nucléaire civile en Inde était donc interdite. Il y a quelques mois, les États-Unis ont cassé ce tabou en proposant un accord de coopération nucléaire civile avec l'Inde. Cet accord, dont les termes n'ont pas été rendus public, est pour l'instant gelé du coté indien (de plus, il n'a toujours pas été validé par le congrès étasunien). Cet accord a provoqué une crise politique en Inde menaçant la coalition formée par le parti du congrès au pouvoir. Les communistes suivis depuis par le BJP (parti nationaliste) refusent ce contrat qui selon eux pourrait remettre en cause l'autonomie de l'Inde dans le nucléaire militaire. Je ne crois pas vraiment que l'Inde accepterait d'abandonner son programme militaire d'une part parce que la bombe fait malheureusement partie des fiertés nationales, d'autre part parce que c'est aussi un argument de poids sur la scène internationale. L'on sait en revanche que cet accord n'autorise un contrôle que partiel des installations nucléaires civiles.
   * Le gel de cet accord pour des raisons de politique intérieure remet en cause les projets de l'Inde qui non seulement doit développer sa capacité énergétique pour soutenir sa croissance mais aussi limiter sa grande dépendance au pétrole. Or il se pourrait bien que cela soit la France qui remplace au pied levé les États-Unis. Rappelons qu'il fut un temps, l'Inde hésitait entre les États-Unis et la France pour son nucléaire civil. La France s'est rapidement trouvée écartée de cet accord au profit des États-Unis avec lesquels l'Inde cherche depuis quelques temps à se rapprocher (ce qui ne déplais pas aux États-Unis trouvant un partenaire asiatique majeur autre que la Chine)1. Mais depuis que cet accord a été gelé du coté indien, des sociétés comme Aréva, EDF, Alstom ou Thalès (toutes françaises et ayant des compétences dans le nucléaire) ont participé à des réunions à Bombay il y a quelques semaines... Et n'oublions pas qu'une visite de Nicolas Sarkozy en Inde est prévue en 2008...
   * En parallèle, l'Inde envisage de développer des centrales nucléaires utilisant du thorium comme combustible en lieu et place de l'uranium. Possédant le quart de réserves mondiales de thorium (contre 1% seulement des réserves mondiales d'uranium), l'inde voit dans cette technologie la possibilité d'une auto-suffisance. La construction d'un prototype est prévue prochainement avant le lancement d'un programme à vocation commerciale prévu pour 2020.

C'est ce qu'on appelle ne pas mettre tout ses oeufs dans le même panier. Notes

1 Il existe tout de même des tensions entre les États-unis et l'Inde concernant la construction d'un gazoduc entre l'Iran et l'Inde via le Pakistan. Projet qui déplaît beaucoup aux étasuniens.